Le désengagement au travail est souvent relégué au second plan, éclipsé par les discours « positifs » sur l’engagement et la motivation des salariés. Pourtant, c’est bien en mesurant objectivement ce qui se dégrade que l’on peut comprendre et prévenir cette érosion progressive de l’implication des employés. À l’heure du télétravail et des mutations profondes du monde du travail, il devient essentiel d’identifier et de traiter les signes du désengagement dans une démarche d’amélioration continue.
C’est dans cette optique que l’Indice de Bien-Être au Travail (IBET©), développé depuis 2010 par Mozart Consulting, propose une approche chiffrée et objective du phénomène. Entretien avec Victor Waknine, son co-fondateur.
Mesurer le désengagement : un changement de paradigme
« Beaucoup parlent d’engagement, mais sans pouvoir le mesurer concrètement ou par la pirouette des approches déclaratives de ressenti. Or, c’est comme vouloir évaluer la bonne santé sans s’intéresser aux maladies », explique Victor Waknine, fondateur de Mozart Consulting. Selon lui, l’engagement ne peut être mesuré directement ; c’est plutôt son absence qui est quantifiable. « On ne peut pas mesurer l’ordre, seul le désordre se mesure », résume-t-il.
Ainsi, l’IBET© repose sur des marqueurs concrets du désengagement, notamment l’absentéisme relatif au travail ou encore le présentéisme, ce phénomène où des employés sont physiquement présents, mais inefficaces. L’enjeu est de dépasser les enquêtes déclaratives souvent biaisées et d’adopter une approche rigoureuse, fondée sur des indicateurs mesurables.
L’IBET© : un outil pour objectiver le malaise organisationnel
L’Indice de Bien-Être au Travail permet d’évaluer l’impact du désengagement en entreprise en tenant compte des absences évitables et des coûts cachés. « L’IBET ne se contente pas d’un simple diagnostic, il donne une vision claire des pertes de productivité réelles », souligne Waknine. En effet, une absence ne se limite pas au nombre de jours non travaillés : elle entraîne souvent une désorganisation, une surcharge pour les collègues et une baisse de l’efficacité globale.
Les entreprises peuvent ainsi cartographier les zones à risque : certains services, métiers ou catégories de salariés peuvent être plus touchés que d’autres. « Il faut dépasser la vision globale et identifier précisément où se situent les fragilités pour pouvoir agir », insiste Waknine.
Télétravail et engagement : une relation ambivalente
L’essor du télétravail a profondément modifié les dynamiques d’engagement. Si certains salariés y trouvent un équilibre favorable, d’autres, contraints de télétravailler ou, au contraire, privés de cette flexibilité, en subissent les effets négatifs. « On observe un écart de désengagement moyen de 10 % entre ceux qui peuvent télétravailler et le souhaitent, et ceux à qui on l’impose ou qui en sont privés », note Waknine. Lorsqu’il est choisi et bien encadré, le télétravail peut améliorer la productivité de près de dix points.
Ces données soulignent l’importance d’une approche individualisée du travail à distance. Plutôt que d’imposer un modèle unique, les entreprises doivent s’adapter aux attentes des collaborateurs pour éviter un désalignement préjudiciable à la motivation et à la performance.
Managers et engagement : un rôle clé
Les managers directs sont en première ligne pour prévenir le désengagement. « L’engagement ne peut pas être à sens unique : il doit être réciproque, sinon il ne fonctionne pas », insiste Waknine. Un management trop rigide ou déconnecté des réalités des salariés peut accentuer le malaise et les départs.
Pour remédier à cela, les entreprises doivent aller au-delà des simples effets d’annonce – « baby-foot en salle de repos ou nomination d’un chief happiness officer » – et s’attaquer aux vrais leviers de motivation : autonomie, reconnaissance, équilibre vie pro-vie perso et qualité du management.
Anticiper les défis de demain
Le désengagement au travail n’est pas une fatalité, mais il nécessite une prise de conscience et des actions concrètes. Grâce à des outils comme l’IBET©, les entreprises peuvent détecter et corriger les signaux faibles avant qu’ils ne se transforment en crises.
Comprendre et prévenir le désengagement est un enjeu central pour maintenir la performance des entreprises et assurer un environnement de travail épanouissant pour tous.
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